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Note : Eh oui, me revoilà ! Ce silence introspectif d’une semaine était un temps de réflexion nécessaire afin de prendre un nouveau tournant plus adéquat selon mon état d’esprit et mes besoins actuels. J’ai usé plusieurs paires de verres de contact sur une minutieuse série de lectures d’études scientifiques très sérieuses, de témoignages pertinents de parents ayant suivi toutes les diètes et chélations des métaux lourds possibles sans obtenir de très significatifs résultats concrets. Cette réflexion m’a amenée à réaliser qu’aucun lien réel, appuyé d’une documentation de source fiable, n’était établi entre certaines pratiques étrangement vantées et des améliorations exceptionnelles. Ou même encore, des guérisons suffisamment courantes pour maintenir avec pertinence l’aspect choc du blogue tel que conçu à la base. J’ai d’abord été réactive, puis je me suis tendrement adoucie. La sagesse de mon grand âge prend sans doute le dessus avec force !
Cependant, je demeure convaincue qu’une meilleure alimentation, des changements de mode de vie plus sains et effectués de manière graduelle, sans risque pour ma santé, peuvent apporter des bienfaits sur ma concentration et plusieurs aspects de ma vie en général. Sans doute, une meilleure gestion des inconvénients quotidiens sera disponible à moi, sans toutefois dissoudre l’autisme. D’ailleurs, personne ne niera qu’un bon régime de vie est bénéfique à chacun, autiste ou non. Ce blogue sera alors maintenant un travail sur le mieux-être. Par contre, il ne sera pas dépourvu de surprises pour autant!
Guérison miracle ? Mais comment deviner ce qui se vit à l’intérieur de l’autre ?
Comme Morpheus affirme à Néo dans La matrice : « il y a une différence entre connaître le chemin et arpenter le chemin…. ». Car observer et vivre une situation sont deux angles dissemblables. Personnellement, j’ai déjà affirmé qu’en matière d’autisme, bien que l’apport des scientifiques et des professionnels soit essentiel, voir l’autisme de l’extérieur équivaut en bonne partie à étudier les fonds marins en restant sur le pont du navire. L’autisme ne se détecte que par des manifestations comportementales visibles par l’observateur, mais à l’intérieur, il ne se voit que par la personne autiste elle-même.
Alors mon questionnement demeure tout entier et grouillant comme un bataillon de fourmis partant en quête de nourriture : comment peut-on regarder une autre personne, son enfant ou un adulte de son entourage, et penser soudainement qu’elle est guérie ? Est-ce que l’estompement de signes voyants induits par un mieux-être et le soulagement de problématiques (digestive notamment) sont le feu vert à une affirmation indiscutable de guérison ? Doit-on sortir nos porte-voix et courir dans les rues en agitant des drapeaux blancs et en tabassant bruyamment nos casseroles usagées avec des ustensiles défraîchis ?
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De mon côté, je suis allée l’an dernier en visite chez une maman, ancienne connaissance d’il y a plus d’une dizaine d’années, qui a plusieurs enfants, dont un jeune autiste de haut niveau âgé de neuf ans. En arrivant dans cette charmante petite famille, le garçonnet autiste s’est présenté à nous et nous a gratifiés d’un très robotique « Bonjour, comment ça va ? » puis est rapidement reparti vaquer à ses occupations précédentes, avant même que nous n’ayons eu l’opportunité d’esquisser une réaction ou une réponse positive. La mère était toute joyeuse de nous affirmer le progrès fou que son fils fait chaque semaine. Mais tristement, je n’y voyais que du par cœur, sans ressenti véritable et une mère bien intentionnée gorgée d’espérance. Nous n’avons plus croisé le petit de tout l’après-midi.
Lors de notre départ, il est revenu nous saluer d’un mode tout aussi mécanique dans son ton vocal et en prononçant les mots qu’on lui a sans aucun doute appris à réciter sans en saisir l’authentique pourquoi. Le voilà juste formaté pour correspondre aux attentes sociales, selon mon humble avis. Mais une surprise nous attendait cependant, au moment d’enfiler bottes et manteau d’hiver pour le retour à la maison. Contre toute attente, il m’a fait un câlin. Sa mère a été vivement étonnée de cette spontanéité à l’endroit d’une personne totalement étrangère. Elle s’est exclamée un : « wow, il ne fait jamais ça avec des étrangers ». Pourquoi moi ? Nous ne le saurons jamais avec certitude. Mais cette communication était vraie, pas apprise ou exigée.
L’autiste va faire des progrès au niveau de la communication tout au long de sa vie et à son rythme, comme une personne francophone immergée dans un monde anglophone apprendra cette nouvelle langue, sans manuel, pour arriver à y survivre. Je le pense sincèrement, m’appuyant sur ce que je constate régulièrement autour de moi et principalement à l’intérieur de moi depuis mon diagnostic. Mais, il n’y a que l’autiste qui sait s’il est ou non encore autiste, quoiqu’on tente comme expérimentation pour le normaliser. Des attitudes incrustées à coups de récompenses ne sont pas un signe que l’autisme s’effiloche.
La majorité de l’autisme se passe à l’intérieur. Je ne crie pas à gorge déployée chaque fois que je suis agressée sensoriellement par l’accumulation de chaque bruit et confrontation sociale, chaque fois que je ne comprends pas une ironie ou une mimique faciale. Beaucoup de ces éléments-clés se vivent à l’intérieur et même si mon comportement extérieur peut changer et estomper les signes « indésirables », les caractéristiques intrinsèques à l’autisme demeurent. Face à l’inconnu, j’ai une tendance naturelle à figer comme un chevreuil devant les phares éblouissants d’un F-150 qui traverse une route en zone forestière ou à me mettre en mode panique et m’agiter. En public, je privilégie la première option pour des raisons de discrétion et de paix, car les crises poivrées de longs sanglots mouillés dans les centres commerciaux bondés dans ma jeune trentaine n’ont pas fait leur preuve autrement que d’attirer des regards énervés et de donner une honte indicible à mon conjoint!
Je fais montre d’une plus grande sociabilité, mais j’ai appris rationnellement et petit à petit et des comportements instinctifs font spontanément leur apparition. Mais ces efforts n’effacent pas tout. Je demeure toujours fatiguée suite à de longs échanges verbaux. Rester dans des lieux bondés et bruyants m’amène migraines et douleurs autour des oreilles, conjuguées à un épuisement physique bien réel équivalent à un entraînement intensif pour un marathon exécuté par un débutant non préparé. Bien des gens me connaissant de longue date pourraient croire à une guérison de ma part, car ma manière de communiquer est plus fluide et plus avenante. Mais en dedans de moi, je suis toujours la même. J’ai juste étendu du glaçage fondant sur mon gâteau. Il est plus « présentable », mais le gâteau regorge toujours des mêmes saveurs de base.
Alors, comment croire que l’autre est guéri, que l’autisme est fini ou touche à sa fin ? L’autiste paraît plus éveillé et plus en mesure de suivre les consignes ? Il regarde dans les yeux et répond à son nom ? Il salue et il reproduit ce qui lui a été appris à coups de répétitions agaçantes ? Il s’approche soudainement des autres sans y être contraint ? Un progrès notable n’est pas une rémission. Il est le signe de la mise en place d’une adaptation qui souhaitons-le sera salutaire. Tout simplement.
L’autisme touche à toutes les sphères de ma vie depuis ma naissance. Que ce soit ma lecture du non-verbal à laquelle je dois penser, car elle n’est pas instinctive, ma perception des réactions et de la manière de penser des non-autistes que je dois résonner selon un pattern que j’ai monté dans ma tête pour survivre, ne pas comprendre le manque de rationalité autour de moi et le manque de justice sociale ou encore la pression sociale de suivre les tendances et la masse sans raison logique qui me parle. Alors comment un changement alimentaire ou des suppléments pris en quantité massive pourraient altérer ma manière d’être et de penser ? Une chose est certaine : il n’y a que moi qui pourrai vous le dire si un jour, je me sens guérie. Personne d’autre.
Au meilleur de ma forme, ça ressemble à quoi ?
Les moments dans ma vie où l’autisme a été le moins problématique dans mon quotidien concordaient toujours à des moments que je qualifierais d’être « au meilleur de ma forme ». Le décalage avec les autres est toujours présent, mais il me dérange moins, même qu’il peut à la rigueur m’amuser. Je suis alors moins anxieuse, je vois venir les événements, mais je demeure toujours aussi réactive devant les imprévus et les situations que je n’arrive pas à gérer à cause des variables inconnues. En gros, oui, je peux donner l’illusion que je suis guérie si je suis observée par un œil extérieur. Je suis moins « détectable », mais toujours la personne bizarre, un peu excentrique ou timide, un peu froide et snobinarde en apparence, celle qui dérange par un « je ne sais quoi » d’innommable.
Mais j’ai connu des moments de grâce où cette différence ne m’atteignait plus. Des jours et même des semaines où la désapprobation des autres m’indifférait. Des instants où je pouvais composer avec mon humour décalé, connecter avec d’autres personnes sans grands efforts et même à la rigueur faire preuve d’aisance en société.
Au meilleur de ma forme, c’est quand je me sens reposée, l’esprit allumé, que je suis entièrement présente et que les soucis habituels ne viennent pas accaparer toutes mes forces intérieures. Des instants où l’anxiété ne vient pas ronger tous les os visibles de mon énergie vitale. En bref, c’est lorsque je suis « toute là », vigilante, centrée, prête à la riposte, peu importe la forme d’agression, minuscule ou énorme, à laquelle je suis confrontée.
Ces instants-là, je veux les retrouver, car ils me permettent de me sentir équilibrée et solide. Je les ai connus lorsque je prenais mieux soin de moi, que j’ai coupé le sucre durant plus d’un mois il y a quelques années, que je faisais de l’exercice modéré plusieurs fois par semaine, que je surveillais davantage mes pensées négatives et que je pratiquais plus rigoureusement la méditation. C’est vers cet équilibre que je tends maintenant. Pour moi et pour les années à venir.
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